CAVL Lettre d'info n°35
Centre Audiovisuel Liège asbl |
Editorial - Médiathèque : édition d'un nouveau tiré à part "25 films pour mieux vivre et agir ensemble" - Ouvrages récents Si le contenu ne s'affiche pas correctement, cliquez ici Cette année, l’éducation aux médias fêtera, en Fédération Wallonie-Bruxelles, son vingtième anniversaire et nous devrions tous nous sentir concernés. C’est, en effet, en 1995 qu’elle a officiellement vu le jour dans notre enseignement, suite à un arrêté pris par Philippe Mahoux, alors ministre de l’Enseignement et de l’Audiovisuel. Le décret de 2008, par ailleurs, a élargi son champ d’action à tout le secteur associatif, prônant ainsi une cohérence hautement souhaitable. Mais rappelons d’abord les objectifs poursuivis par l’EAM : former à l’analyse critique des messages médiatiques, quel que soit leur support, favoriser parallèlement l’expression/communication par les médias, ainsi que l’auto-évaluation de ses propres comportements de récepteur ou d’émetteur. Trois objectifs parfaitement complémentaires qui devraient contribuer à l’épanouissement de l’individu et à sa responsabilisation de citoyen. On perçoit immédiatement toute l’importance de tels apprentissages dans une société comme la nôtre, où les médias ont envahi l’espace public et privé, en conditionnant très souvent nos comportements et notre perception du monde. |
Au cours des vingt années qui viennent de s’écouler, l’EAM a forcément connu beaucoup de mutations, à l’image même des médias qu’elle entend analyser. Elle a aussi été sollicitée, à maintes reprises, par nos responsables politiques et pédagogiques, soit pour relativiser les représentations psycho-sociales que ces médias proposent à leur public, soit pour « éteindre des incendies » lors de dérives sur les réseaux sociaux ou de cyber-harcèlement et, plus récemment, pour aider à désamorcer des stratégies de radicalisation sur le Net. Bref, l’EAM est souvent perçue comme le remède miracle à prescrire en période de crise. Mais que représente-t-elle concrètement sur le terrain scolaire et associatif ? Elle est pilotée par le Conseil Supérieur de l’Education aux Médias (CSEM), qui remet des avis au Gouvernement et organise également un certain nombre d’opérations avec le concours des trois centres de ressources et de partenaires du monde des médias. Il s’agit notamment d’Ouvrir mon quotidien, Journaliste en classe ou Ecran large sur tableau noir. Le CSEM dispose aussi de ses propres groupes de travail qui publient des référentiels de compétences médiatiques, des fiches pédagogiques, des appels à projets ou nouent de nouveaux partenariats, notamment au plan de la formation initiale et continuée des enseignants. Travail considérable mais qui, trop souvent, apparaît comme une goutte d’eau dans l’océan, tant les appels à l’aide se multiplient et les moyens se réduisent. Ainsi, les dotations accordées aux centres de ressources en 95 n’ont pratiquement pas évolué d’un euro, c’est dire que ceux-ci peinent à payer le salaire de leurs chargés de missions et à acquérir les outils nécessaires à leurs missions. Ce manque de moyens humains et matériels, si préoccupant soit-il, n’est pas le seul problème rencontré par l’EAM. Celle-ci est souvent victime de confusions et d’interprétations erronées. Ainsi, l’éducation aux médias, qui prend le média comme objet d’analyse ou de communication sociale, ne peut se réduire à une éducation par les médias où ceux-ci se limitent à être de simples auxiliaires d’apprentissage. Autre confusion courante, l’EAM ne peut s’identifier à une quelconque maîtrise de l’informatique et de ses applications, pas plus qu’à la seule pratique des technologies de l’information et de la communication. Nous ne voulons cependant pas mettre en doute ici les mérites bien réels de l’école numérique. Elle a créé un nouvel environnement d’apprentissage, un dynamisme de recherche et de remise en question et surtout une relation nouvelle enseignant-élèves. Cette relation se fonde désormais sur un travail collaboratif et sur l’accomplissement collectif plutôt qu’individuel. C’est là un progrès dont chacun peut légitimement se réjouir et dont l’EAM précisément peut tirer un réel profit, aussi longtemps qu’elle réussit à échapper à la seule performance technologique. A côté du manque réel de moyens, de certaines confusions quant à la nature même de l’EAM, il y a aussi cette dérive sécuritaire qui menace le concept et les pratiques qu’il devrait induire. Il est évidemment plus confortable de promouvoir la protection et la prévention que de former à une autonomie critique, plus simple de crier au loup que d’entraîner à la réflexion et à la prise de recul. Enfin, nous avons évoqué les sollicitations de plus en plus nombreuses dont l’EAM est l’objet. C’est évidemment un bien que l’on se souvienne qu’elle existe, mais il devient très réducteur de n’y avoir recours qu’en temps de crise ou en situation d’urgence. Car les interventions en contextes critiques – comme c’est souvent le cas pour l’instant – font immanquablement l’économie d’une action en profondeur et sur le long terme. Former, éduquer, argumenter, construire, convaincre, réclament un investissement en temps et en ressources humaines afin de ne pas se trouver tôt ou tard en porte-à-faux par rapport à la réalité quotidienne. Dans le domaine de l’EAM, un tel investissement est un passage obligé. Confrontée à des défis qui n’ont cessé de se multiplier et de se diversifier au cours de ces vingt dernières années, l’EAM telle que nous voulons la pratiquer et l’enseigner ne peut plus se contenter d’effets d’annonce ou d’une simple présence dans les déclarations gouvernementales successives, elle réclame d’urgence un cadre opérationnel, une rigueur de gestion et des moyens. A défaut de pouvoir pour l’instant prétendre à un statut de cours à part entière, l’EAM pourrait s’intégrer à cette formation citoyenne que chacun souhaite aujourd’hui de tous ses vœux, elle pourrait en tout cas en constituer un substrat de qualité avec la mise en perspective critique qu’elle ne cesse de préconiser et la dimension sociale qu’elle entend cultiver. Michel Clarembeaux Médiathèque : édition d'un nouveau tiré à part « 25 films pour mieux vivre et agir ensemble »
Ce tiré-à-part est téléchargeable gratuitement sur notre site. Sophie Lescrenier Depuis mars 2015 (Lettre d’Info n°34), cinq ouvrages récents sur les médias ont fait l’objet d’une recension, qui se trouve sur notre site. Nous les évoquons ici par le biais d’abstracts. Pour les analyses complètes, cliquez sur le titre de l'ouvrage qui vous intéresse.
M. Cl. |